Étiquette : mode

Ça roule pour Lady Haberton

Vous pensiez que bicyclette et allure ne pouvaient gravir ensemble le même podium ? A vos marques ! Prêts ? Lisez le portrait de Lucile Hamoignon.   Initiales L.H comme Lady Harberton et Lucile Hamoignon. Un petit siècle les sépare mais leurs destins semblent scellés par quelques aspirations communes. À la fin du XIXe siècle, Lady Harberton milite pour le droit des femmes à se déplacer en vélo et imagine, en plein règne du corset, des tenues adaptées à la pratique de la petite reine. Lorsqu’en 2015, Lucile Hamoignon, ingénieur urbaniste qui, « adolescente fabriquait déjà des fringues et, étudiante, concevait des costumes de spectacles », cherche un nom pour la société qu’elle lance, le clin d’œil à la quête d’émancipation jadis menée par Lady Harberton est évident. « Je me suis toujours dit qu’un jour, je monterai ma marque mais pas une énième marque de mode, je voulais qu’il y ait du sens. Je ne dessine pas une forme juste pour dessiner une forme ou des lignes juste pour des lignes. » Etre chic à vélo Résultat des courses, le Messenger, un sac à main qui permet aux femmes soucieuses de leur style d’être chic à vélo. Marier maroquinerie et cyclisme, le pari était loin d’être gagné tant les tenues sportives privilégient rarement la féminité et le bon goût. Chez Lady Harberton, « la forme résulte de la fonction. » Sous-titre de cette philosophie en forme d’accord toltèque : tout doit être pratique sans que l’usager ne sans rende compte. « Une fois qu’on a compris le rythme du Messenger, c’est totalement logique. On déclipse, on reclipse. En trois gestes, le sac est sur le dos », affirme Lucile. Que nos lecteurs qui se rasent les jambes pour des vertus aérodynamiques se rassurent, un prototype de sac pour les hommes est en cours de réflexion. Quant à ceux et celles qui ne savent pas pédaler, pas de panique, le style Lady Harberton se porte tout aussi bien à pied. Il n’y a pas qu’avec son sac Messenger que Lucile Hamoignon fait rouler la mode hors des sentiers battus. Si Lady Harberton était encore de ce monde, nul doute qu’elle prendrait plaisir à parader avec toute la gamme assortie : bandeau, écharpe, casquette, bonnet, porte-carte, snood, bijoux, t-shirt jusqu’à l’indispensable serre-pantalon en cuir. www.ladyhaberton.fr

Plateau fertile dope le textile

Ce n’est pas un atelier de couture. Ce n’est pas non plus un fab-lab. Ni un espace de coworking et de formation. Plateau Fertile, c’est tout à la fois ! Visite guidée d’un tiers-lieu dédié à la mode, au textile et au design, véritable ovni dans le paysage de l’innovation textile.  Dans les locaux de cette ancienne entreprise de tissage et de filature, Plateau Fertile propose un espace de mutualisation autour de la création et de la confection textile. Dans un décor industriel d’époque avec carrelage ancien et grandes baies vitrées sont mises à disposition des professionnels des piqueuses, surjeteuses, bourdonneuses… « Plateau Fertile, c’est permettre l’accès aux machines mais c’est aussi du partage de compétences pour la création de prototypes ou la co-création de nouveaux modèles », explique Benoît Frys, directeur du Plateau Fertile, ancien salarié de Cyrillus, Burton of London ou 3 Suisses. « L’initiative est venue l’association NordCréa qui souhaitait proposer un service innovant à sa centaine d’adhérents travaillant dans la mode et le textile dans les Hauts-de-France. » L’éclosion de ce tiers-lieu a été appuyé par la Métropole européenne de Lille, la Ville de Roubaix et le Conseil Régional. © Sébastien Jarry © Sébastien Jarry © Sébastien Jarry © Sébastien Jarry © Sébastien Jarry Upcycling et recyclage La spécialité du lieu ? La customisation, avec un vrai parti-pris pour l’up-cycling et le recyclage. Camaïeu vient justement de passer une commande pour customiser un surstock de jupes fleuries en S et XL : Plateau Fertile intervient pour y coudre des lettres découpées au laser afin de leur donner une seconde vie. L’enseigne Auchan est également intéressée par cette fabrication locale de nouvelles tendances. « Nous souhaitons avant tout être un lieu d’expérimentation, résume Benoît Frys. Notre objectif, c’est d’accompagner les jeunes créateurs grâce au fab-lab qui permet de créer des mini-séries mais aussi de sensibiliser et de former les jeunes aux métiers de la mode. » Le futur de la mode made in France est en marche. www.plateaufertile.fr

Daniel Essa, chausseur de stars

D’où venez-vous Daniel Essa ? Je suis né à Homs en Syrie. J’ai fait des études de business et d’économie à l’université de Damas, mais au bout de trois ans, j’ai abandonné pour donner vie à mon rêve : devenir styliste ! J’ai toujours été passionné de mode et dessiné des chaussures. J’ai intégré Esmod à Damas et terminé mon cursus en remportant le Grand Prix lors du défilé final. J’ai ensuite créé deux émissions de télévision, un peu à la mode Cristina Cordula, diffusées sur une chaîne de grande écoute qui m’ont permis de me faire connaître. J’ai ensuite monté mon atelier à Damas pour proposer mes collections, mais la guerre a éclaté et j’ai fui mon pays. Pourquoi la France ? J’ai d’abord rejoint l’Espagne, mais la France, c’était mon rêve. Le pays de la mode et de l’élégance. Un ami lillois m’a accueilli et je suis tombé amoureux de cette région. J’ai appris le français puis j’ai commencé par dessiner des modèles en freelance pour différentes marques. Quelques mois plus tard, je me suis lancé en dessinant mes premiers sneakers et trouvé une usine pour les fabriquer. J’ai rencontré l’équipe de Maisons de Mode qui m’a aidé à créer la marque et à trouver ce local, à Roubaix, dans lequel j’ai installé mon showroom. Depuis, je vis un rêve. Mes chaussures font le tour du monde. Que retenir de vos créations ? J’ai un style très minimaliste. Mes sneakers allient style et confort. Je ne suis aucune tendance. J’aime l’élégance naturelle. Les petits détails font la différence. Comment avez-vous créé votre collection ? J’ai créé ma première collection dans la campagne italienne, au milieu des oliviers. Il n’y avait ni wifi, ni micro-ondes, rien. J’étais seul dans ma bulle face à la nature. Où peut-on trouver vos sneakers ? Chez 5A Créateurs au Printemps Haussmann à Paris, dans une boutique de luxe à Lyon, chez Opium à Ajaccio, au Madison de Beverly Hills, au Harvey Nichols à Dubai, au Koweit, sur mon site web et bien sûr ici dans mon showroom à Roubaix ! Woopy Goldberg comme une ambassadrice ! L’anecdote est digne d’un film. Alors que Daniel n’a pas encore lancé sa marque, il arpente les allées d’un salon à Milan avec ses prototypes et rencontre par hasard Ken, un directeur artistique américain qui le somme de les lui prêter. Ken les porte à un défilé new-yorkais. A quelques mètres de lui, l’actrice Woopy Goldberg craque. Elle envoie son agent. Deux jours plus tard, Daniel reçoit un mail. L’actrice veut SES sneakers. Mais elles ne sont pas fabriquées et sa marque n’existe pas ! Qu’importe. Woopy attend patiemment. Quatre mois plus tard, sneakers au pied, elle partage son coup de cœur sur les réseaux sociaux… Depuis d’autres vedettes lui ont emboîté le pas : Bella Thorne ou encore Olivia Palermo ne jurent que par Daniel Essa. 26 Je suis né le 26 juin. Et croyez-moi ou non, je me suis rendu compte que beaucoup de ceux qui m’ont aidé à créer ma marque et donc à réaliser mon rêve sont nés un 26 !  www.danielessa.com

Prothésiste, tout un art

Quand un orthoprothésiste et une styliste de mode se rencontrent cela donne U-exist qui propose des prothèses fun et personnalisées qu’on est fier de montrer. Simon Colin, orthoprothésiste de formation a étudié à Bruxelles et a toujours été préoccupé par le côté froid de la prothèse, toujours de couleur chair, grise ou noire. « L’acceptation de la prothèse était rendue encore plus difficile par son aspect impersonnel. » Le jeune homme rédige son mémoire sur la customisation des prothèses et reçoit un accueil chaleureux du jury. U-exist est déjà en gestation. Sa rencontre avec Amandine Labbé styliste et professeur à Esmod fera le reste : elle apportera avec elle l’univers de la mode dans celui des prothèses. Personne n’y avait pensé et c’est une chouette idée : en 2014 ils fondent ensemble U-Exist : « Vous aussi, jouez de votre différence. » Le partage des rôles se fait naturellement : Simon prend en charge l’aspect technique et l’impression des motifs sur les matières, quand Amandine s’occupe de constituer une collection de motifs. Car c’est véritablement d’une collection dont on peut parler, comme dans la mode. Le catalogue présente 250 motifs différents © Sébastien Jarry © Sébastien Jarry Des collections capsules « Le catalogue présente 250 motifs différents, organisés par thématique, pour tous les âges, tous les styles, hommes, femmes et enfants », précise Cindy Habchi, chargée de communication de U-exist. Les motifs sont créés par Amandine ou par un réseau d’artistes avec des collections capsules comme dans la mode : Nikok et ses motifs robotiques, Laure Poitreau et ses motifs animaliers pastel ou encore Boniett et ses carpes sur fond fleuri. Il est possible aussi pour le patient de recourir au service U-adapt s’il a lui-même créé ou dessiné un motif qu’il souhaite voir reproduire sur sa prothèse. Ou encore, grâce à U-custom faire réaliser sur mesure un motif qui lui appartiendra à vie. Une dimension humaine primordiale L’entreprise fonctionne comme une start-up, « On n’est que 4 et on est forcément touche-à-tout » , ce qui convient parfaitement à Baptiste Jules, le commercial du quatuor. C’est lui qui se charge notamment d’agrandir le réseau des orthoprothésistes avec lesquels l’entreprise travaille, déjà au nombre de 50. « Chez U-Exist, ce n’est pas un travail de commercial comme les autres. Il y a forcément une dimension humaine primordiale et cela me plaît. Je vends quelque chose d’utile et je crois en ce que je vends. » U-exist habille des prothèses de patients dans toute la France et commence même à s’internationaliser : en Allemagne, en Belgique, en Italie, aux Pays-Bas ou encore en Australie ! La start-up peut aussi compter sur des ambassadeurs de choix comme Jean-Baptiste Alaize, plusieurs fois champion du monde en saut en longueur, dont la prothèse raconte l’histoire. Cindy Habchi se réjouit : « On a l’impression que la mode s’ouvre de plus en plus au monde du handicap, on a récemment réalisé un shooting photo très mode, très fun. » C’est certain, U-exist apporte tous les jours sa petite pierre à l’édifice pour que ce regard change. Et les patients sont ravis que la conversation s’engage désormais sur le motif original et non sur la prothèse elle-même. Pari gagné. u-exist.com

Anti-Fashion en mode responsable

De Marseille à Roubaix, Stéphanie Calvino n’a pas hésité : son Anti-Fashion Project s’impose désormais comme un trait d’union entre les deux villes, associant un grand nom de la mode comme La Redoute mais aussi la très renommée école de mode Esmod. Objectif : aider les jeunes des quartiers populaires à réinventer une mode plus durable. Le 3 septembre 2018, Arnice Troïka a vécu sa première rentrée à Esmod Roubaix. La jeune fille de 22 ans était plutôt intimidée d’assister à ses premiers cours au sein de la prestigieuse École supérieure des arts et techniques de la mode de Roubaix. « Moi qui n’étais plus scolarisée, je me retrouve dans une haute école de mode… C’est fabuleux, c’est incroyable, je n’arrive à réaliser ce que Anti-Fashion Project m’a apporté », résume-t-elle. Il faut dire qu’Arnice, originaire de Guyane, s’est battue pour en arriver là. Si cette première année de cursus lui a été offerte (ce qui représente quand même près de 10 000 euros), c’est parce qu’elle a décroché le Prix Esmod Roubaix en partenariat avec La Redoute. Le jury a salué unanimement « son implication et sa persévérance » et l’originalité de la tenue présentée. « J’ai concocté une tenue qui raconte un passé assez personnel », résume la jeune fille. Derrière sa voix frêle, on devine un parcours de vie compliqué. Elle a entièrement fabriqué un jogging-combi style guerrière un haut avec des manches extra larges et des épaulettes extravagantes, en utilisant du vinyle orné de fleurs au niveau des seins et pour le short, le tout complété par des jambières. Comme une protection mais aussi une renaissance. © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson © Jean-Christophe Husson Dénoncer les dérives de la 2e industrie la plus polluante du monde « J’avais d’abord voulu d’abord devenir esthéticienne mais je ne trouvais pas de stage. » C’est la mission locale de Roubaix qui lui a conseillé de s’adresser à Anti-Fashion Project. « J’ai alors rencontré beaucoup de personnes fabuleuses et extraordinaires », sourit la jeune fille. Comme Li Edelkoort, à l’origine du Manifeste Anti-Fashion : cette véritable pythie de la mode travaille beaucoup avec les végétaux pour dénoncer les dérives de la 2e industrie la plus polluante au monde. Ou encore Sylvette Boutin Lepers, responsable des partenariats Créateur & Image de La Redoute, qui lui a ouvert les coulisses d’une grande enseigne de mode. Arnice est à l’image des autres réussites de ce projet, « rencontrer ces jeunes en difficulté et qui se cherchent, qui sont intéressés par la mode, éveiller leurs sens autour de la matière textile, pour les accompagner le plus possible selon leurs envies », résume Stéphanie Calvino, à l’origine de ce travail. « On ne fait pas de la réinsertion, on ouvre la porte vers tous les possibles. » J’ai alors rencontré beaucoup de personnes fabuleuses et extraordinaires, ARNICE anti-fashion-project.com