Des racines et des rêves

Théo Yossa a 20 ans et la maturité d’une vieille âme. Etudiant à l’EDHEC, le fondateur de l’association Le Carré bleu multiplie les projets créatifs et engagés. Roubaisien depuis ses 3 ans, Théo a fait de La Condition Publique sa maison. Avec le Labo 148, il s’est illustré dans la web-série « Des Racines et des Rêves », lancée avec France 3 Hauts-de-France en mars 2021. Le jeune auteur nous offre son slam écrit pour l’occasion. Un poème urbain qui rend hommage à ses racines africaines. Attention talent à suivre…

Parce qu’on est né ici, mais que notre histoire a commencé ailleurs
Que nos victoires résonnent aussi ailleurs
Mais qu’elles soient ici aussi amères.
Je le dis sciemment qu’on a pas que comme choix de carrière : footballeur ou Mc Hammer.
Notre différence se dresse inconsciemment.
On est des Français comme les autres
On peut se vautrer comme réussir brillamment.

Roubaix, au carrefour des cultures et des diasporas
Je vois l’Afrique partout, sur les plates, sur les visages, sur les tissages,
Ce type de métissage est ce qui m’emportera.

Et plus petit,
J’ai pris ma peur et regardé mon corps
Toucher mes mains et serrer très fort les bras qui m’ont vu naître
Sans doute en recherche de réconfort.
Je comprenais pas comment la culture de mon père me rendait si différent, je ne voulais pas l’admettre.
Se rendait-il compte de la douleur de la mère
Quand ils ont comparé ma peau à la couleur de la merde

Plus tard,
Comme un gladiateur dans l’arène d’Athènes
Rien ne pouvait m’atteindre.
J’ai commencé à apprécier ma teinte et ma personne dans son ensemble.
Période de l’adolescence, je reste avec ceux qui me ressemblent
Ils appellent ça rassemblement communautaire mais je voyais ça une comme aubaine.

Le sentiment d’être protégé des remarques
De cette époque, j’en tire aucun remords.
Elle m’a permis d’être qui je suis, de mener ma barque
Un peu en retard, mais bien arrivé à bon port.

Chers auditeurs, chères auditrices
Le temps s’écoule, c’est indéniable. Mais par quel orifice ?
Un jour, on m’a parlé de cette force qui venait de mes origines.
Parti dans les bras du prédateur, j’avais peur que l’Afrique me voie comme son horrible fils.

Crédit photo : Anaïs Gadeau – Ville de Roubaix